Ce texte est une porte d’entrée dans la compréhension du modèle Cascade. Il ne s’agit pas ici de décrire les fonctionnalités précises de la plateforme, mais de donner les clefs pour comprendre le système Cascade à partir de trois notions : la contribution, la redistribution et les cycles.

Pourquoi s’intéresser à ce système ? Parce qu’il ouvre une voie concrète pour d’autres formes de développement économique, affranchies des logiques capitalistes : Cascade permet à des structures comme les tiers-lieux, coopératives, associations ou collectifs militants de collecter et gérer les contributions qui soutiennent leurs activités, sans lucrativité.

Lorsque l’enjeu n’est plus de dégager un profit, mais de permettre à une activité d’exister et de durer, un champ immense de nouvelles possibilités s’ouvre. La lucrativité, en imposant des logiques de compétition, de captation et de rente, étouffe la créativité et fracture les collectifs qui voudraient fonctionner autrement. À l’inverse, un modèle contributif comme Cascade rend possible un développement plus cohérent avec les finalités sociales, politiques ou écologiques portées par ces communautés.

Pour construire ce système, nous partons de pratiques existantes observées sur le terrain, auprès d’acteurs qui expérimentent déjà d’autres façons de produire et développer des services. Cascade en propose une formalisation générique capable de faire système.

Ce texte peut servir :

Contribution, Redistribution, Cycles

Le terme « Cascade » désigne à la fois la plateforme, le système, et l’objet fondamental de collecte de fonds. Une cascade est une caisse contributive orientée vers un objectif défini, connectée à d’autres cascades dans un système mutualisé.

Dans ce modèle, l’enjeu n’est pas d’accumuler le plus gros montant possible mais de sécuriser des activités dans le temps, en adaptant les contributions aux besoins réels. Chaque cascade devient alors une brique active d’un système économique mutualisé, interopérable, traçable et durable.

La contribution et la répartition se présentent dans ce système comme les deux moments clés, se répétant en cycles temporels. Voici en détail comment ces trois éléments fonctionnent.

La contribution, unité de base du système

Cascade est une plateforme de collecte et de gestion de fonds. Mais contrairement à ses concurrents, la contribution dans Cascade n’est pas un simple prix fixe.

Par contribution, on entend ici l’ensemble des moyens – monétaire ou non –  destiné à soutenir directement un objectif partagé défini dans une cascade. Ce n’est ni un don, ni un prix, ni une taxe. Elle vise à participer à l’atteinte d’un objectif collectif.

L’objectif partagé est au cœur du mécanisme de contribution de Cascade. Il représente la quantité nécessaire à collecter durant un cycle déterminé pour permettre à un service d’exister ou à un projet d’aboutir. La contribution est le moyen de partager cet effort avec les autres membres d’une Cascade.

La contribution dans Cascade possède 5 attributs : elle est (1) adaptative, (2) à la source, (3) plurielle, (4) régularisable et (5) différable.

La contribution est adaptative

La contribution Cascade s’ajuste à l’objectif collectif, contrairement aux modèles conventionnels qui fonctionnent par accumulation, où l’objectif est défini en privé et intégré dans un prix fixe en vue de réaliser le profit. Dans Cascade, un objectif auquel les contributions s’ajustent est toujours défini. Par exemple, si l’objectif est de 100 € pour produire un objet ou financer un service, et que 10 personnes participent, chacune contribue à hauteur de 10 €. Si une onzième personne rejoint la cascade, la contribution de chacun peut être ajustée à 9€. Dans un système classique, le prix serait resté à 10 €, générant un surplus capté par l’opérateur.

Cet attribut de la contribution est d’autant plus puissant que le nombre de contributeurs augmente. Il rend possible une forme de communauté d’intérêt économique entre celui qui propose et celui qui bénéficie du service. C’est le fondement philosophique du modèle : penser une économie comme un effort partagé et non comme une simple transaction entre producteur et consommateur.

La contribution est à la source

La contribution finance directement les différentes composantes du service. Par exemple pour un gite, l’hébergement est un service fourni distinctement de celui lié à la réservation par une plateforme. Contrairement aux modèles économiques conventionnels, où sous couvert de simplification le prix masque sa composition (souvent pour mieux intégrer le profit), la contribution Cascade a une structure de « prix composé » de 4 parts séparées :

Chaque part est affectée à ce qu’elle finance, ce qui permet une grande transparence des flux. La part d’activité réseau est particulièrement intéressante, car lorsqu’une des composantes du service est elle-même structurée en cascade, la contribution d’un utilisateur peut nourrir directement plusieurs niveaux d’organisation. C’est par ce biais qu’est notamment réalisé le financement de la plateforme Cascade.

Cela transforme le service en un commun solidaire par construction. La structure du système crée l’interdépendance, et donc la robustesse collective.

La contribution est plurielle

La contribution est monétaire ou non monétaire (temps, compétences, apport de matériel, etc.). Pour dépasser le paradigme capitaliste qui transforme toute relation en marchandise, Cascade cherche à réconcilier la souplesse de l’argent avec la possibilité de faire fonctionner des services sous d’autres modalités que la transaction monétaire. L’objectif n’est pas de hiérarchiser les formes de contribution, mais de permettre leur cohabitation sur un pied d’égalité fonctionnelle. Cela permet notamment de réintégrer et de valoriser le travail bénévole, fréquemment mobilisé dans les modèles associatifs sans être reconnu comme une composante à part entière de la valeur produite. En l’absence de cette reconnaissance, on observe souvent des captations de valeur au moment où le service devient pérenne, au profit de celles et ceux qui savent habilement ensuite se positionner. Cascade prévient ces déséquilibres structurels par une traçabilité et une valorisation équitable de toutes les contributions, quelle que soit leur forme.

La contribution est régularisable

Elle est ajustable après coup si l’objectif est difficile à définir. Ce mécanisme est particulièrement utile lorsque certaines composantes du service présentent une forte incertitude, rendant difficile la fixation d’un objectif au préalable. Par exemple, dans un contexte d’occupation temporaire, les coûts liés à la consommation d’eau, d’électricité ou de gaz peuvent fluctuer significativement selon les usages. De même, un restaurant qui fonctionnerait en mode cascade ne connaîtrait pas à l’avance le nombre de couverts d’un service donné, ce qui empêcherait de fixer un objectif à l’avance. Dans ces cas-là, la contribution est provisionnée, puis régularisée a posteriori, à la hausse comme à la baisse, en fonction de la réalité constatée. Cela permet une plus grande précision budgétaire tout en conservant la logique d’adaptation à l’objectif réel. Des mécanismes assurantiels maison peuvent aussi émerger avec cette logique.

La contribution est différable

Elle peut être engagée maintenant, versée plus tard. Ce mécanisme permet d’inclure des contributeurs qui, à un moment donné, ne disposent pas des ressources immédiates, mais souhaitent néanmoins manifester leur engagement. Le cas le plus fréquent est celui d’une structure en création ou en transition, qui peut déclarer une intention de contribution en amont (par exemple via une promesse ou un contrat moral), et la réaliser lorsque sa situation le permet. La contribution différée permet aussi d’anticiper une montée en charge progressive du service, en donnant du temps aux contributeurs pour apprécier le prix réel du service. Il renforce ainsi la soutenabilité collective, sans exclure celles et ceux qui sont en décalage temporel avec la dynamique financière.

Conclusion

Cascade propose donc une logique de contribution variable dans son coût, sa composition et sa nature, en opposition avec la majorité des systèmes classiques de collecte ou de tarification.

Cette souplesse permet à Cascade de rester équitable dans la dynamique collective, tout en offrant un outil précis pour l’ingénierie économique. Elle s’inscrit dans une logique de régulation dynamique qui prépare naturellement le terrain à la redistribution abordée dans la section suivante.

La redistribution, régulateur interne du système

Les attributs de la contribution visent à limiter en amont la création de surplus ou de déficit, en ajustant les apports à un objectif défini collectivement. Toutefois, une cela permet pas de garantir nécessairement l’équilibre immédiat entre les contributions reçues et l’objectif à atteindre. Cet équilibre est envisageable lorsque le nombre de contributeurs et le montant visé sont compatibles avec les capacités réelles du groupe, dans des proportions telles que l’adaptation reste acceptable pour tous.

En effet, des déséquilibres apparaissent fréquemment dans la pratique :

S’il est facile de comprendre comment une cascade peut être déficitaire (manque de ressources et de contributeurs), le surplus peut résulter de dynamiques plus fines à saisir. Le surplus peut être :

Puisque Cascade fonctionne par cycles, ces déséquilibres ne sont pas figés dans le temps :

L’action sur le surplus ou sur le déficit est déterminante pour réguler adéquatement la cascade. Celle-ci est manuelle et fait appel à des processus de décision qui ne peuvent être automatisés.

La régulation comme vecteur de gouvernance

La gestion de ces écarts devient ainsi un levier de pilotage, un outil dynamique au cœur de la logique redistributive de Cascade. Elle marque également un point de bascule vers une gouvernance fondée sur les données : à partir de l’état des contributions, des surplus ou des déficits, s’ouvre un espace de décision contextualisé et collectif. Contrairement aux outils démocratiques classiques (type Loomio ou Decidim), qui se concentrent sur l’ingénierie du vote (types de scrutin, quorums, etc.), Cascade active la gouvernance à partir des données réelles d’activité et de l’équilibre économique.

Un surplus ou un déficit devient une alerte qui appelle une décision : faut-il abonder un autre projet en difficulté ? Réduire les charges ? Augmenter les contributions ? Chercher un soutien extérieur ? Puisque ces signaux s’inscrivent dans des cycles contributifs, ils permettent de créer des moments réguliers de délibération collective sur des sujets concrets. Par exemple : « Vous avez trop de contributeurs sur ce projet alors qu’un autre dans votre réseau est en souffrance, souhaitez-vous transférer une part de vos excédents ? » ou « Vous accumulez des déficits depuis trois cycles, souhaitez-vous revoir votre niveau de cotisation, ajuster vos dépenses ou chercher du soutien ? ».

Pour que les logiques contributive et redistributive prennent pleinement leur sens, elles doivent s’inscrire dans le temps. C’est là que la notion de cycles intervient : elle structure le rythme du système, comme une partition donne forme à une mélodie. Les cycles permettent de coordonner les contributions, de réguler les écarts, et de créer des moments de gouvernance collective situés dans une temporalité concrète.

Les cycles, rythme temporel du système

La contributions et la régulation s’effectuent dans le temps selon des cycles : il s’agit de périodes temporelles définies (par exemple un mois, un trimestre, un semestre), pendant lesquelles une cascade collecte des contributions et active ses mécanismes internes (adaptation à l’objectif, redistribution, régularisation, gouvernance, etc.).

Les cycles sont essentiels car ils donnent du rythme à la vie économique d’un projet ou d’un collectif : ils permettent de structurer les temps forts, d’aligner les ambitions de développement, d’adapter les contributions à la temporalité des besoins (lents ou rapides) et de programmer des moments réguliers de régulation.

Ils incarnent une forme de respiration du modèle économique de Cascade, en encadrant la circulation des contributions dans le temps, tout en ouvrant des fenêtres de délibération démocratique sur des éléments concrets, mesurables, et situés. Ils sont de deux types :

Les cycles définissent aussi un caractère essentiel de la contribution : sa fréquence. Un contributeur peut participer à chaque cycle et ainsi s’inscrire dans une logique récurrente, ou bien ne contribuer qu’une seule fois ponctuellement. Cette distinction est importante car elle influence la manière dont on pense la légitimité des contributeurs à participer à la gouvernance d’une cascade.

Un contributeur actif sur plusieurs cycles peut être considéré comme plus directement impliqué dans la dynamique du projet, tandis qu’un contributeur ponctuel peut avoir un rôle plus limité. Pour éviter les effets de passager clandestin ou de captation opportuniste des processus décisionnels, des mécanismes de seuil peuvent être mis en place. Ceux-ci permettent, par exemple, de réserver certaines décisions aux contributeurs ayant participé à un nombre minimum de cycles, ou ayant engagé un certain niveau de contribution sur la durée.

Cette approche permet de relier la fréquence de contribution à un degré d’implication reconnu, sans exclure ceux qui ne peuvent contribuer que ponctuellement. Elle participe ainsi à une gouvernance plus juste et plus contextuelle, en valorisant l’engagement réel dans la durée.

Cas d’usages

Maintenant que la logique globale de Cascade est établie, voici des exemples concrets illustrant son fonctionnement dans des contextes très différents. Chaque cas permet de mieux comprendre comment les logiques de contribution, de redistribution et de cycle s’appliquent, tout en mettant en évidence les avantages concrets par rapport à un système économique classique.

Tiers-lieux

Une association gère un bâtiment où plusieurs acteurs cohabitent : artisans, formateurs, groupes culturels. Chacun a des usages, des rythmes et des capacités financières différents. Avec Cascade, une caisse commune ajuste automatiquement les contributions des occupants en fonction de leurs usages réels et des charges à couvrir (chauffage, électricité, coordination, etc.).

En fin de cycle, les excédents sont réaffectés selon des règles collectivement définies : baisse temporaire des loyers, investissement dans l’espace commun, soutien à une autre structure du même réseau. Une fois par an, un mécanisme de péréquation permet d’équilibrer les budgets entre plusieurs structures associées dans la gestion du tiers-lieux.

➡️ Avantage du modèle : l’occupation temporaire implique souvent des incertitudes sur les coûts et les ressources. Cascade permet de répartir équitablement les contributions selon les usages réels, d’agir sur les déséquilibres au fil du temps, et de transformer la gestion en un processus coopératif traçable.

Plateforme coopérative

Une petite équipe maintient un logiciel utilisé par une cinquantaine de coopératives locales de livraison à vélo associées en fédération coopérative. Pour garantir la maintenance et l’évolution de la plateforme, une cascade continue est mise en place. Elle couvre l’hébergement, le support et les développements, tout en adaptant la contribution de chaque coopérative à ses moyens. Par ailleurs, les subventions que touche ponctuellement la fédération permettent de diminuer les cotisations.

Les coopératives plus petites peuvent contribuer en différé et/ou en nature (présentation du projets aux nouveaux, documentation, test). Les excédents sont fléchés vers un fond permettant de garantir la stabilité de la fédération. Avec le temps, la plateforme a atteint une maturité technique suffisante : les besoins en développement ont diminué, et les coûts se sont concentrés sur la maintenance et le support. Plutôt que de baisser l’objectif, la fédération a choisi de maintenir le niveau de contribution pour financer des postes mutualisées, notamment en matière de développement commercial au service de l’ensemble du réseau.

Ce cas d’usage est également l’exemple type du modèle économique de la plateforme Cascade elle-même.

➡️ Avantage du modèle : Contrairement à un modèle basé sur des prestations ou du capital-risque, Cascade permet une viabilité structurelle distribuée, pilotée par les besoins collectifs et les cycles contributifs.

Cantine de quartier en prix libre

Un réseau de cantines et restaurants utilise Cascade comme système de paiement en caisse. Le modèle repose sur un repas à prix unique, volontairement fixé au-dessus du coût de revient direct. Ce tarif permet de couvrir non seulement les charges alimentaires, mais aussi de garantir une juste rémunération du personnel et de stabiliser l’activité.

Chaque repas payé alimente une cascade quotidienne. En fin de service, une régulation est proposée aux clients : une remise sur le prochain repas si les charges réelles sont inférieures à l’objectif. Certains clients, notamment les plus aisés ou sensibilisés à la démarche, choisissent de « laisser la monnaie » et ne demandent pas cette remise. Ces excédents, agrégés à l’échelle du mois, sont transférés vers une cascade partagée entre les cantines.

Cette caisse inter-cantines permet de financer des événements gratuits dans les quartiers populaires : repas solidaires, animations culturelles, débats publics. Le modèle Cascade permet ainsi à une économie locale de s’organiser au niveau national, d’assurer sa propre viabilité et de mener des projets sociaux conformes aux valeurs du collectif.

➡️ Apport du système Cascade : au lieu d’un prix libre imprévisible, un tarif stable mais régularisable permet de garantir la viabilité des cantines, tout en réinjectant les excédents dans des actions collectives à l’échelle nationale.

Festival culturel

Un collectif organise un festival culturel. L’événement dure trois jours, mais l’organisation se déploie sur plusieurs mois. La cascade est donc configurée comme un cycle fini découpé en plusieurs phases : prévente, vente classique et temps de l’événement. Chaque phase dispose de son propre objectif correspondant aux besoins de chaque phase.

Le prix du billet est initialement fixé à 25€, mais comme la contribution est adaptative, ce prix diminue à mesure que le nombre de festivaliers augmente : plus les gens s’engagent, plus le prix se rapproche du coût réel par participant. En fin de phase, une régularisation propose aux premiers acheteurs une remise (ou un avoir) si l’objectif est dépassé.

Le surplus généré est réaffecté à des activités gratuites pendant le festival (ateliers, scène ouverte) et à un fond de soutien pour l’édition suivante.

➡️ Avantage du modèle : Cascade permet de traiter les activités à échéance comme des événements, avec une décroissance du coût d’entrée rendue possible par l’effet de masse.

Supermarché coopératif

Un supermarché coopératif repose sur des achats groupés, une marge faible ou nulle, et une coopération active entre fournisseurs, membres et gestionnaires. Son défi principal : atteindre l’équilibre économique tout en garantissant une transparence totale sur les flux financiers. Avec Cascade, le modèle se renforce grâce à un système contributif intégré et régulier.

Dans les premiers cycles, le prix des produits peut être ajusté pour tester le seuil d’équilibre : trop bas, il met en danger la viabilité ; trop haut, il compromet l’accessibilité. Cascade permet de calibrer ce seuil dynamiquement, cycle après cycle. Une fois l’équilibre atteint et la coopérative en vitesse de croisière, les prix peuvent être abaissés grâce à l’arrivée de nouveaux contributeurs-client du supermarché et aux effets d’échelle, tout en maintenant la stabilité financière.

Une part du prix payé par les membres alimente une caisse de régulation. Celle-ci permet d’absorber les produits invendus, de soutenir les producteurs fragiles ou d’investir dans des infrastructures collectives (chambre froide, outils logistiques, etc.). En fin de mois, un cycle de régulation redistribue les excédents : bons d’achat pour les membres, baisse ponctuelle des prix ou soutien à des initiatives locales.

➡️ Avantage du modèle : Cascade permet non seulement de rendre visibles les flux économiques internes, mais aussi d’ajuster en temps réel l’équilibre du supermarché. Il offre une réponse concrète à la promesse coopérative : accessibilité, stabilité, solidarité et ancrage local.

Meta label musical

Un réseau de musiciens traditionnels issus de villages et de petites villes partout en France anime régulièrement des bals et fêtes populaires. À la fin de chaque événement, ils proposent à la vente leurs CD auto-produits, souvent à échelle très locale.

Pour dépasser l’isolement de chacun, ils décident de créer un meta-label contributif en utilisant Cascade. Une cascade nationale unique est mise en place pour mutualiser les frais liés à la production physique des CD (pressage, impression, livret), au design graphique, à la logistique d’envoi, mais aussi à la diffusion en ligne via une plateforme commune.

Chaque musicien ou petit groupe contribue à la cascade en proportion du nombre d’albums qu’il souhaite produire ou vendre, mais aussi selon ses moyens : certains donnent plus pour soutenir le collectif, d’autres contribuent en nature (graphisme, distribution, tournées communes). Les ventes réalisées localement sont déclarées en fin de cycle (chaque trimestre), ce qui déclenche une régularisation : ajustement des contributions, redistribution des surplus, réinvestissement dans de nouveaux projets. Cela fonctionne comme un réseau de distribution inversé : chacun vend sur son territoire, mais l’effort de production est porté collectivement.

➡️ Avantage du modèle : en supprimant les coûts intermédiaires liés aux petits tirages ou à la sous-traitance commerciale, les musiciens gagnent en marge, en autonomie et en qualité, tout en maintenant une démarche artisanale et indépendante.

Objections courantes

« Cascade ne garantit pas la viabilité économique d’un projet »

« …OK, vous organisez une démarche plus collective et transparente. Mais si personne ne veut contribuer, ou si l’objectif est irréaliste, le système échoue quand même. »*

Cette limite est réelle et Cascade n’est pas un tour de magie, mais un dispositif d’équilibre dynamique entre besoins et contributions. La plateforme ne garantit pas qu’un projet fonctionnera et elle ne remplace ni l’engagement collectif ni la nécessité d’un objectif pertinent. En revanche, elle rend ajustable et transparent l’effort nécessaire à la réalisation d’une activité. Là où d’autres modèles masquent les coûts ou isolent les contributeurs, Cascade permet d’assoir un objectif commun, de rendre visibles les écarts et de les réguler. Cascade permet également d’activer des initiatives en rendant tangible l’intérêt à massifier la contribution à un service par la réduction tendanciel de son coût d’accès. C’est cette capacité à activer la coopération qui distingue Cascade d’un simple outil de paiement ou d’une campagne de financement classique.

« L’adaptation du prix, c’est déjà fait dans le capitalisme »

« …Ce que vous appelez contribution adaptative, c’est déjà ce que fait un tarif dégressif ou une remise fidélité. »

Il faut bien insister sur la différence fondamentale : ici, on s’adapte à un objectif partagé connu, défini collectivement. Dans un modèle capitaliste, la flexibilité du prix vise avant tout à capter le plus de valeur possible. Dans Cascade, l’adaptation sert à ajuster la contribution à un besoin réel, identifié, transparent. C’est la différence entre un prix qui fluctue pour extraire de la valeur, et une contribution qui s’ajuste pour répondre à un objectif commun. Cela transforme la logique économique sous-jacente : on ne paie pas « le prix qu’on est prêt à mettre », mais ce qui est nécessaire pour que le service fonctionne pour tous.

« Ça manque d’information sur le fonctionnement pratique »

« …Comment est fixé l’objectif ? Est-ce un montant arbitraire ? Un calcul comptable ? Comment s’opère la régulation ? Est-ce automatique, semi-automatique, validé collectivement ? Qui gouverne une cascade ? Le porteur ? Un collectif ? Les contributeurs ? »

Ce texte ne vise pas à détailler l’ensemble des mécanismes techniques ou des paramètres du système, mais à faire comprendre une logique structurelle suffisamment souple pour s’appliquer à une grande diversité de contextes. L’un des atouts majeurs de Cascade est sa capacité à être paramétré selon les besoins du terrain : certaines cascades peuvent être pilotées collectivement, d’autres de façon déléguée ; certains objectifs peuvent être fixés à partir de comptabilités prévisionnelles, d’autres de manière politique.

Cascade n’impose pas un modèle unique mais propose un cadre à la fois cohérent et évolutif. Cette souplesse est rendue possible par le fait que le système est conçu comme un commun numérique, amélioré en permanence par une équipe mandatée par ses utilisateurs pour renforcer sa généricité, sa robustesse, et sa capacité à faire émerger de nouveaux usages.

« C’est super, j’adore l’idée ! Mais est-ce que ce n’est pas trop compliqué à comprendre ou à expliquer ? »

« …Nous, on a besoin de quelque chose de simple. Si on doit expliquer la cascade, la contribution régularisable, les cycles… ça va être trop lourd pour nos usagers. »

Cascade est aussi un dispositif d’apprentissage collectif. Il est conçu pour permettre une montée en compétence progressive, avec des interfaces simples. En outre, il est possible de configurer des cas d’usage très simples, avec peu d’éléments visibles, puis d’enrichir progressivement le modèle selon la maturité du collectif. C’est un outil modulaire, pas un dogme.

Surtout, Cascade se construit de manière incrémentale : nous n’en sommes qu’au tout début. Le système présenté ici pose une philosophie et une architecture de base, mais son développement est encore en cours. Cela signifie que cette philosophie pourra être adaptée à mesure que de nouveaux besoins concrets émergent. Ce sont les usages réels, les contextes et les acteurs de terrain qui orienteront son évolution pour qu’il reste pertinent, accessible et opérationnel dans des situations très diverses.

« Est-ce que ça ne va pas décourager les financeurs institutionnels ? »

“…Si tout est en régulation ouverte, comment présenter un budget clair à la Région ?”

Cascade ne remplace pas la comptabilité. Il la rend plus justifiable et lisible, en alignant les contributions sur des objectifs chiffrés. Les financeurs peuvent eux-mêmes contribuer, ou observer le fonctionnement d’une cascade en toute transparence. Cela peut même renforcer leur confiance dans la bonne gestion des ressources.

« Pourquoi ne pas simplement faire appel à du mécénat ou du crowdfunding ? »

Le crowdfunding est un acte ponctuel et souvent émotionnel, tandis que Cascade organise une économie contributive durable. Ce n’est pas un appel à soutien, c’est un modèle de fonctionnement où chacun sait pourquoi il donne, à quoi cela sert, et peut participer à l’ajustement collectif.

« Comment être sûr que l’usage des contributions est réellement non lucratif ? »

« …Rien n’empêche quelqu’un de détourner le système à son profit, ou de prétendre à une logique contributive alors qu’il capte de la valeur. »

Cascade repose sur des mécanismes structurels et juridiques qui encadrent l’usage des contributions pour garantir leur non-lucrativité :

➡️ En résumé : ce n’est pas une question de confiance dans les intentions, mais de conception d’un système qui empêche structurellement la captation privée. Le modèle est fait pour rendre la lucrativité techniquement et politiquement indésirable.

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